Jean Véronis
Aix-en-Provence
(France)


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mardi, mars 24, 2009

Sarko: M’enfin, qu’est-ce qui z’ont tous contre moi ?

Ce serait intéressant, un jour d’étudier comment les thèmes se propagent dans le monde journalistique... De temps à autre, émergent des sujets qui se mettent à faire boule de neige, sans qu'on voie bien le rapport avec l'actualité. Pourquoi, comment ? Mystère. Peut-être que les journalistes se lisent les uns les autres, et savent flairer les sujets qui ont l’air vendeur.


Cette semaine mon téléphone n’arrête pas de sonner... Sarkozy massacre le français, avez vous noté ? Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez pour la Gazette de Petaouchnok ? Enfin, Gazette de Petaouchnok ou pas, d’ailleurs, car c’est le très sérieux Times qui me demandait hier de prendre la température linguistique de notre président, et à l’instant c'est la BBC (qui lit sans doute le Times) qui me demande si Molière est mort une deuxième fois. L’affaire sort manifestement de l’hexagone. Rien de nouveau pourtant : où est l’actu ? Personne n’a jamais entendu les « M’enfin M’ame Chabot » pendant la campagne ? Sarkozy massacre la syntaxe depuis des années, et ça n’a jamais semblé émouvoir personne…

On pourrait tracer la propagation du « bon sujet » sur Google Maps. A ma connaissance la charge a commencé avec le coup de trompette d’Hélène Risser sur Public Sénat il y a quelques jours, qui me demandait ce que je pensais de la dégradation de subjonctif chez le président et autres avanies qu’il inflige à la langue française. Cela a-t-il inspiré des collègues ? Nous ne le saurons jamais, mais ça a suivi, Le Parisien titrait le 22 « Sarkozy malmène le français », et épinglait quelques jolis spécimens : « Si y en a que ça les démange d’augmenter les impôts… », « On se demande c’est à quoi ça leur a servi ? », « J’écoute, mais je tiens pas compte ! », etc. Il faut dire qu’en pleine semaine de la langue française, le sujet est bon. Et puis, on ne sait plus trop quoi dire sur Sarko : on a déjà tout dit dix fois (et lui aussi). Saturation médiatique. Alors pour une fois qu’on tient un truc vendeur… Le 23 c’est Actu.be qui reprend l’info et titre « Sarkozy, terroriste de la langue française ». Rien que ça. Puis, comme je le disais, le Times s’y met hier, ce soir ou demain la BBC…

Ou cela va-t-il s’arrêter ? J’aimerais bien voir la carte en temps réel. Les journalistes américains lisent le Times de Londres, donc il y a gros à parier qu’on va voir quelque chose dans le NYT, ou dans l’Iowa Sentinel.

En tout cas, à 50 ans, si t’es président et tu sais pas parler, alors y’a de l’espoir dans les banlieues ! Arrêtez de voler des Rolex, les mecs. Continuez à massacrer la langue, z’y va, et vous avez de l'avenir.

17 Commentaires:

Blogger Loran a écrit...

Lol.

24 mars, 2009 18:08  
Anonymous Anonyme a écrit...

Effectivement, le phénomène de focalisation sur un sujet est assez étrange. Ce n'est pourtant pas comme s'il n'y avait pas d'autres sujets à traiter...

En tout cas, j'aurais apprécié que ce sujet sorte plus tôt. Sa façon de parler m'horripile depuis la campagne présidentielle -_-

24 mars, 2009 19:31  
Anonymous Anonyme a écrit...

Le français approximatif de notre président était en effet largement perceptible dès la campagne. J'avais à l'époque (4/5/07) blogué sur le fait que l'on avait sérieusement charié Ségolène pour sa "bravitude", alors que dans le même temps Sarkozy nous avait gratifié, sans conséquence médiatique, de quatre merveilleux néologisme : héritation, trentagénaire, fatitude, conquérance. Et je prenais Google à témoin. Ce jour là, pas une seule page ne mentionnait en même temps ces quatre barbarismes.
Mieux encore, les commentaires de mon billet apportèrent encore d'autres perles : "attaque ad nominem", "financement périn", sans oublier ce mémorable : "les allemands, qui sont nos principalS clients, nos principalS partenaires...".

24 mars, 2009 20:08  
Anonymous Anonyme a écrit...

Ah bah c'est qu'en lisant vot' artic' qu'j'ai enfin compris vot' titre qu'il est bien mal écrit !
Vo't tit' en fait y dit : "M'enfin qu'est-ce z'ont tous cont'moi ?" C'est ça hein ?

25 mars, 2009 00:10  
Anonymous Anonyme a écrit...

Oui les journalistes sont des plagiaires. Pas forcément à leur initiative, leur red'chef en est souvent la cause. Et la raison en est simple : tous passent leur temps à lire la concurrence et écrire à toute pompe sur « les sujets qu'ils ont manqué » plutôt que d'enquêter.

Ce phénomène de loupe médiatique s'est largement aggravé avec la mise en réseau des médias. Un logiciel de cartographie comme le Newsmap de Marumushi donne bien à voir quels sujets dominent les Google News.

25 mars, 2009 04:04  
Anonymous Anonyme a écrit...

Il y a même des néologismes qui sont entrés dans le dico depuis l'élection de N. S. Par exemple, depuis l'arche de zoé et plus récemment l'affaire Cassez, c'est le mot "transferment" qui personnellement m'écorche les oreilles, un mot qui a trouvé son existence dans la langue française alors que le mot "transfert" suffisait à exprimer ce que "transferment" souhaite signifier. Curieux mais la langue française est ainsi...

25 mars, 2009 08:53  
Anonymous Anonyme a écrit...

Bonjour,
Même Stéphane Guillon semble lire le Times. En tout cas ce matin ça l'a inspiré d'autant qu'il y avait Henri GUAINO (Conseiller spécial du Président) en invité juste après.
http://www.radiofrance.fr/franceinter/video/humour.php

MBt

25 mars, 2009 09:27  
Blogger Jean Véronis a écrit...

MBT> Excellent! Suivi en direct d'un "meme" journalistique...

25 mars, 2009 09:29  
Anonymous Anonyme a écrit...

réponse à VIDI
moi aussi, j'ai été choqué par transfèrement à l'époque mais j'étais allé voir dans mon Robert. Et là, surprise, c'est un mot de 1704 qui concerne les prisonniers que l'on transfère.
C'est génial comme dépoussiérage.
Emmanuel

25 mars, 2009 16:42  
Anonymous Anonyme a écrit...

Ah ok surprenant... ! comme quoi...

25 mars, 2009 17:29  
Anonymous Anonyme a écrit...

N'importe quelle tête pensante universitaire entrevue ( ou"interviewée"? ) à la télé ne manque pas de parler de " la foultitude de paramètres à prendre en compte dans cette expérience..."

Donc foule + multitude = foultitude, une drôle de chimère qui semble avoir éradiqué ses deux parents de la langue française...

Va falloir réécrire les classiques: " Et Dieu s'adressa à la foultitude..."

25 mars, 2009 21:10  
Anonymous Anonyme a écrit...

Voir aussi la chronique (pas terrible) de Stéphane Guillon sur France Inter de mercredi matin ..l'invité la plume de Sarkozy, ceci expliquant sans doute cela ..

26 mars, 2009 16:54  
Blogger claire a écrit...

Ferais-je partie des journalistes? Non, bien sûr.
Mais j'avoue que j'ai, moi aussi, dans mon petit coin, exprimé mon suprême agacement pas plus tard que ce mercredi.
Bien sûr, le sujet est dans l'air du temps, mais je pense aussi que l'on arrive à un trop-plein. Je ne citerai que mon exemple : j'en ai assez et je trouve ce langage présidentiel tout simplement humiliant...
A cette façon de parler, je préfère la langue de certains "djeunz" qui utilisent un vocabulaire imagé, et imaginatif, sans pour autant (autant) massacrer la syntaxe.
Bref, ça fait du bien d'en parler...

27 mars, 2009 08:50  
Anonymous NBPS a écrit...

A Vidi,
Je réagis un peu tard, mais transfèrement est tout à fait correct. Ce terme est utilisé, notamment, par l'administration pénitentiaire pour qualifier le transport d'un détenu d'une prison à une autre. Le transfert qualifiant l'ensemble de l'opération.

30 mars, 2009 10:45  
Anonymous Anonyme a écrit...

L'effet boule de neige dans les sujets qui ont la grâce des médias est passionnant et pas assez creusé. Modeste consommateur d'info, je me souviens en 2002 de l'effervescence autour de la peine de mort menaçant Abdullah Ocalan, indépendantiste kurde en Turquie. Durant quelques semaines, pas un JT sans qu'on en parle et au final, le buzz a décru sans qu'on (le téléspectateur francophone) sache s'il avait été exécuté ou pas ! Les mécanismes d'apparition et de disparition des buzz d'actu sont un vrai sujet à théoriser.

02 avril, 2009 10:56  
Anonymous Anonyme a écrit...

Certes il malmène le français.. comme une écrasante majorité de nos compatriotes!
Ce n'est pas une excuse mais n'exagère-t-on pas le phénomène en sortant quasiment tous les mots qu'il prononce de leur contexte? C'est devenu un sport national! La preuve ultime étant la dernière phrase qui lui est reprochée à propos de Zapatero..

Quand je dis:
"Il n'est peut être pas trés rapide, mais il court le 100 mètres en moins de 10 secondes."

Cela veut-il dire;
-Il n'est pas trés rapide.
-Ou bien au contraire il court extrêmement vite?

S.Royal et votre ami F. Bayrou se sont engouffrés un peu hativement dans la brèche..

Politique, quand tu nous tiens!

21 avril, 2009 11:06  
Anonymous Anonyme a écrit...

A lire à propos du phénomène de loupe médiatique (principalement pour les médias présents sur internet, mais presque tous le sont) :

http://www.bakchich.info/Infos-le-net-en-circuit-ferme,07902.html

06 juin, 2009 00:25  

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